L’ARAFER, l’autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, vient de publier un premier bilan sur le marché du bus en France suite à la libéralisation permise par la loi Macron au mois d’août dernier. Au 31 décembre 2015, plus de 770 000 personnes avaient emprunté l’une des 148 lignes proposées par l’un des six principaux opérateurs : Eurolines, Isilines, Flixbus, Megabus, Ouibus et Starshipper.
Doublement du nombre de villes desservies
Dans son rapport, l’ARAFER indique que 62 villes françaises étaient desservies en cabotage avant la libéralisation du marché du bus en France. Après le 8 août 2015, date à laquelle le décret d’application de la loi Macron a été publié, le nombre de ville desservie par une compagnie de bus a plus que doublé pour atteindre 136 villes réparties dans 69 départements.Parmi ces 136 villes, l’ensemble de celles ayant plus de 400 000 habitants (Paris, Marseille, Lyon et Toulouse) sont desservies. Près de 86% des villes ayant une population comprises entre 100 000 et 400 000 habitants disposent de lignes de bus longue distance tandis que ce taux descend à près de 40% pour les villes dont la population est comprise entre 50 000 et 100 000 habitants.
Si les villes de moins de 50 000 habitants représentent 53% des villes desservies par une compagnie de bus, on s’aperçoit rapidement qu’en taux de couverture cela ne représente que 6,2% des communes françaises de moins de 50 000 habitants.
Un nombre inégal de lignes selon les compagnies
A la fin décembre 2015, 148 lignes étaient opérées par les compagnies, ce qui représente 689 liaisons et une longueur cumulée de 75 715 kilomètres.
OUIBUS et isilines/Eurolines sont les deux compagnies qui proposaient le plus de lignes commercialisées avec 47 pour la première et 46 pour le groupe Transdev. Les autres opérateurs disposaient quant à eux, au quatrième trimestre 2015, de 28 lignes pour FlixBus, 14 pour Megabus et 13 pour Starshipper.
L’ARAFER constate que parmi les 73 lignes existantes fin septembre 2015, 18% ont vu leur fréquence quotidienne augmenter, 68% n’ont pas connu d’évolution tandis que 14% ont été revues à la baisse. Preuve que les opérateurs adaptent leurs lignes en fonction des besoins réels des voyageurs après le lancement.
Explosion des liaisons mais une fréquentation disparate
Mis à part Eurolines qui n’a pas proposé de nouvelles liaisons entre le troisième trimestre et le quatrième trimestre 2015, l’ensemble des compagnies a connu une forte augmentation de leur nombre de liaisons. Il est ainsi passé de 436 en septembre 2015 à 689 en décembre 2015 (voire même 1038 si l’on prend en compte les liaisons en concurrence) pour 350 départs quotidiens en moyenne. Ce sont FlixBus (de 5 à 246 liaisons, +4820%), OUIBUS (de 17 à 80 liaisons, +371%) et Megabus (de 19 à 50 liaisons, + 163%) qui ont connu les plus fortes augmentation.
Si 770 400 passagers ont été transportés entre août et décembre 2015, près de 51% d’entre eux ont voyagé à bord de bus circulant sur l’une des 10 liaisons les plus empruntées. Elles sont toutes au départ ou à destination de Paris alors que seulement 13 % des liaisons passent par la capitale. Voici ci après les liaisons concernées :
- Paris — Lille : 80 400 passagers
- Paris — Lyon : 70 900 passagers
- Paris — Rouen : 27 200 passagers
- Paris — Nantes : 25 700 passagers
- Paris — Rennes : 24 900 passagers
- Paris — Strasbourg : 24 500 passagers
- Paris — Toulouse : 24 300 passagers
- Paris — Bordeaux : 23 000 passagers
- Paris — Angers : 16 600 passagers
- Paris — Le Mans : 13 600 passagers
Les liaisons de bus Paris – Lille et Paris – Lyon représentent à elles seules 22% du trafic total.
Des cars peu remplis
A l’heure actuelle, les bus en circulation sont que peu remplis avec un taux d’occupation de 32,4% en moyenne. Cependant, le rapport indique qu’il faut être prudent concernant ce taux étant donné qu’un très grand nombre de lignes se sont lancées au cours des derniers mois. Anne Yvrande-Billon, vice-présidente de l’Arafer, déclare que « cette fréquentation est bonne après seulement deux trimestres. Nous pensions qu’au départ elle serait inférieure à ce chiffre. »
Le rapport de l’ARAFER permet également de voir que le bus se démocratise petit à petit puisque les lignes ayant un taux de remplissage inférieur à 15% ont fortement diminué entre le troisième trimestre et le quatrième trimestre passant de 34% à 18%. D’ailleurs l’organisme constate que malgré des handicaps apparents, l’autocar a réalisé un bon démarrage, comparable à ce qui avait pu être constaté en Allemagne lors de la libéralisation en 2013.
Une forte demande pour les lignes de moins de 100km
Pierre Cardo, président de l’ARAFER, s’est étonné du nombre de déclarations effectuées pour des projets de lignes de moins de 100 km alors que « le cœur des autocaristes disait pourtant qu’il n’y aurait pas de liaisons courtes ».
Au 15 mars 2016, 120 déclarations avaient été déposées et 48 projets n’avaient fait l’objet d’aucune saisine tandis que 24 saisines sont actuellement en cours d’instruction. Pour rappel, les compagnies doivent soumettre leurs projets de lignes de moins de 100 kilomètres auprès de l’ARAFER puis les autorités organisatrices de transport (AOT) ont un délai de deux mois pour contester ces demandes si elles estiment qu’elles concurrencent les services publics existants (TER et les lignes départementales en autocar).
Des infrastructures à améliorer
La question des infrastructures pour accueillir les personnes qui voyagent en bus reste l’une des questions primordiales pour permettre l’essor de ce mode de transport. Au mois d’août dernier, Michel Seyt, président de la Fédération Nationale des Transports de Voyageurs (FNTV), indiquait qu’il n’était pas concevable « que la prise en charge des passagers se fasse au bord de la route ». Or, comme le soulignait Jean-Marc Janaillac, le patron de Transdev qui a lancé isilines, « une préfecture sur deux n’a pas de gare routière ».
Preuve qu’il y a encore un déficit sur ce point, l’ARAFER indique dans son rapport que seulement 32% des points d’arrêts proposés sont des gares routières. Le développement du bus passera également par la mise en place ou la rénovation des gares routières si l’on ne veut pas connaître les mêmes problèmes qu’en Allemagne. Laurent Guihéry, professeur en sciences des transports à l’université de Cergy-Pontoise, rappelle que « les opérateurs ont été débordés par le succès […] Et comme il n’y a pas là non plus de bon réseau de gares routières, les arrêts sont parfois signalés par un simple autocollant sur un poteau au coin d’une rue… »
Sources : ARAFER, L’Usine Nouvelle – Crédit Photo : [Taina Sohlman] © 123RF.com
Ecrit par Alexandre de KelBillet le 29 mars 2016
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A propos de l'auteur : Alexandre de KelBillet
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